Ravon Lateur

mardi 22 juillet 2014

Mais qui êtes-vous, mais vous êtes qui ? C'est quoi, le sang qui coule dans vos veines, du goudron ? Vous êtes fabriqués en quoi, en mélasse ?

Censure dans l'ascenseur

Depuis 2008, 6 ans déjà, qu'est-ce qu'il s'est passé ? Pourquoi ce silence (que personne n'aura remarqué, mais tout de même, pourquoi ?) ? Le manichéisme a dérapé, on est devenu américain avec les années, on voulait plus se cacher et donc on a tergiversé et on a donné à manger, un peu, à ceux qui avaient faim de savoir. Ce qui pouvait bien se tramer dans l'alcôve. Tellement de choses. Tellement de naïvetés réduites en poussière et tellement de nouvelles questions. Et autant de réponses à l'emporte-pièce, celles qui nous conviennent bien sur le moment.

Pendant un moment, même, après l'adolescence rideuse, plus rien, une mollesse que certains pourraient appeler sagesse, méditation, bouddherie. Une mollesse et une fatigue, un recentrage sur les choses pratiques, plus l'alcool, plus la fumée, donc plus le rock n'roll. Est-ce que ça a changé quelque chose ? Oui et non. L'expression s'est faite plus difficile, le boost d'adrénaline en moins, la poésie se dit moins, elle se garde à l'intérieur, voire elle se peint, mais les mots manquent parfois, comme si y'en avait plus besoin.

Les crève-coeur et les salemoncetés se succèdent comme avant, avec chaque fois l'impression qu'on va péter la fatalité, qu'il n'y a pas de fatalité, il y a juste des stats et que plus tu enchaînes, plus t'as des chances de te ramasser, comme à l'inverse du loto. Et pourtant, même si ça finit toujours par faire mal, ça n'envahit plus, ça reste à sa place de tristesse et de manque, en marge du reste qui va normalement, voire médiocrement, et dont il faudra aussi s'occuper un jour.

D'ailleurs, cette question aussi, et si on arrête de vouloir s'améliorer, se poser des questions, bosser sur ce qui va pas, sur ce qui bute, sur ce qui souffre, qu'est-ce qui se passe ? Le truc-là, dont ils parlent tous, s'accepter, ça veut dire quoi, en vrai ? Laisser tomber, renoncer ? Je suis pas sûre, mais il y a un arrière-goût de soumission bon enfant dans ce conseil, qui s'applique fort adroitement aux femmes, évidemment. Les femmes qui sont toujours légion et volontaires pour se modeler sur les désirs des autres, mais qui cherchent aussi et en même temps à s'affranchir du joug, masculin en général. Les femmes qui sont les premières candidates au questionnement existentiel, au doute et au clivage.

Eux, quel que soit leur état de fragilité interne, ils ont quand même cette espèce d'évidence inscrite dans leurs gènes : ils pensent à eux, d'abord, et faut pas trop les faire chier quand ils le font. C'est une espèce d'évidence qui vient de loin, ça se sent quand on les côtoie. Même s'ils sont un peu soumis, un peu brisés, un peu toutous, ils ne le seront jamais comme une femme, ils ne s'abandonneront jamais complètement. Ils ont appris, depuis tout petits, qu'ils avaient une valeur en tant que représentants du sexe fort. Et si c'est pas par leurs parents, c'est le reste de la société qui le leur a dit. Ils peuvent plus, quoi qu'il arrive, parce que le monde est à eux, fait par eux et pour eux. Alors, ils agissent et se posent moins de questions, forcément. Et nous trouvent compliquées et insatisfaites.

lundi 20 octobre 2008

Bloody opium eaters

L'autre, avec ses cheveux plaqués en arrière, ses grands yeux bleus tout plats comme ceux d'un bébé, son air perdu, évaporé. Il se regarde en dedans. Il a beau ne plus voir vraiment, il se regarde en dedans.

Comme le médecin, tout comme le médecin. Les mêmes yeux d'aveugle. J'ai peut-être été un peu trop féroce avec ce pauvre petit médecin aux grands yeux plats. Non, pas féroce, oublieuse. Moi seule sait ce que j'en ai pensé vraiment. Et c'était féroce. Pauvre petit bébé médecin, ta toute petite bouche de mangeur d'opium féminin, de bébé bougon, d'oisillon picpic. Irrrk.

L'autre avec ses cheveux plaqués et son air spectral, oh, si triste, et si abîmé par la vie. Et la femme blonde, elle, toute soumise comme on l'était à l'époque, toute douce et toute soumise. Elle ne dit pas grand-chose. C'est pas ce qu'on lui demande. Elle est lasse et triste elle aussi. Elle a un coude posé sur le comptoir et au bout de son bras flasque sa tête s'appuie. Elle ressemble à une fille que je connais. C'est fou ce qu'elle lui ressemble. D'ailleurs, cette fille s'habille un peu années trente. C'est incroyable comme les images se chevauchent dans un cerveau. Pour peu qu'il ait mangé un peu d'opium.

La soeur, la soeur avec ses nattes relevées au-dessus de sa tête toute aplatie, toute dure, comme la mienne, peut-être. Cette soeur qui manoeuvre pour récupérer la gamine, car elle a l'ovaire sec, ça se voit, ça se sent. Cette soeur doit pouvoir m'apprendre des choses.

Et déjà à mettre du rouge à lèvres.

jeudi 16 octobre 2008

Sexy parasite (ou plutôt l'inverse)

Bon, alors qu'est-ce que j'ai ? Un gros truc sur le nez ? Un gros truc sur le cerveau ? Ils veulent pas de moi, tous, là, ohlala, je suis trop... euh fragile ? Non, c'est pas possible, je ressemble à une allemande en short kaki. Bon, alors, trop... euh dure ? Ach, mais oui, mais bon, faut vraiment être débile pour pas voir que c'est juste la pellicule et qu'une pellicule, par définition, ça se pèle avant de... Bon, alors, c'est quoi ?

Ok, parfois, j'ai l'impression d'être un petit garçon. Je le sens dans mes fibres tendues : j'étends les jambes comme un petit garçon, je tire pas sur ma minijupe vu que j'en ai pas (plus ?), je me mets des pelisses de skater, j'ai le corps alerte et je contourne bien les obstacles, hop, hypervigilantie, je fais du Taille Chie à ma sauce devant la glace avant la douche, que même personne il se tord les poignets comme moi, je suis sûre et personne il fait la danse du bidou comme moi, c'est sûr et que bientôt, je serai de nouveau fuselée comme la carlingue d'avant, fuselée comme une fusée. Mais ils veulent pas d'une fusée. Non.

Est-ce que c'est parce que je suis trop dangereuse, que j'ai deux Colt chargés dans les yeux et que ma langue délie la franchise deep inside comme par inadvertance, toujours ? Ou que j'aime bien aller voir plus loin si j'y suis et si quelqu'un d'autre y est aussi. Est-ce que c'est parce que je ne sais pas m'effacer, faire comme les princesses tank girls qui prennent la mouche au moindre pet de travers et tournent les talons, le menton relevé, en faisant "pffff, povcon". Disparaître. Se taire. Ne pas avoir d'envie propre. Que si eux, ils veulent pas, pfff, alors là, franchement, ils savent pas ce qu'ils ratent, tellement j'assure, normalement. D'ailleurs, s'ils veulent pas, ben, moi non plus, je veux pas, tac. Easy. Sauf que non.

Je sais pas faire ça. Si mon pou personnel a goûté un sang à son goût, il s'accroche, le bougre. La vraie teignasse. D'ailleurs, il y en a pas mal qui ont fini par le trouver cool, mon pou, à force de se faire sucer la moelle. Ils se sont habitués à avoir un pou sur l'épaule, qui leur racontait des gnistoires, et après ils ont plus jamais pu s'en passer. Mais le pou s'est repu : il en est tombé.

Il y en a un qui a fait "Oh, my God, ce qu'il est chouette, ce pou, mais seulement quand j'enlèverai mon armure de temps en temps, je sais pas quand, jamais peut-être, par inadvertance, mais quand même dégage un peu, là, le pou, t'es lourd". Faut dire qu'il nourrissait son crew au creux du nid, oison affamé, oiselle déprimée. On le comprend. Mais du coup, il a dégagé son chouette pou et il s'en est trouvé plein d'autres moins avides, peut-être, moins chouettes peut-être, et encore, mais plus disposables. Mon pou personnel en est resté comme deux ronds de flanc, tout ridé, tout desséché. Des poils blancs lui ont poussé dessus.

Bon, alors c'est que ce pou, on le veut bien, en fait, ok, mais on le range après. Faut pas trop qu'il traîne dans le coin, ça ferait désordre. Faut pas trop qu'il la ramène, qu'il dise un peu "salut, euh, salut, je suis vivant, tu me donnes ton cou ?", parce que sinon, ça perturbe. J'ose plus le dire. Que je suis vivante. A ceux que ça aurait pu intéresser fut un temps. Parce que ça va les perturber. Et ils vont m'en vouloir.

Alors, c'est ça alors ? C'est que ça perturbe et qu'on n'a pas que ça à foutre, nan, mais c'est vrai quoi ? La ligne est toute tracée pour ceux qui tiennent en laisse leurs intérieurs. N'empêche, je sais pas, je remettrais des minijupes, je crois que les intérieurs tenus en laisse se tiendraient moins bien, d'un coup.

Le seul problème, c'est que j'assumerais pas, je crois. L'évidence m'emmerde. Le gros, le gras, l'advertisement à 2 balles, je crois prétentieusement pouvoir m'en passer. Les regards à la con je supporte pas. Je sais tout là-dessus depuis que j'ai 10 ans. Alors, au lieu de devenir la killeuse de base que j'aurais pu peut-être, je me suis transformée en pou allemand. Histoire que ce soit bien pas évident. N'empêche, là, la non-évidence commence à devenir lourde.

A la rigueur, je préférerais avoir une gros bouton sur le nez. Parce que je pourrais attendre que ça passe.

First things first

Mister Jeckyll, Docteur Hyde, les vieux clichés, allez, allez, on y va !
Déversoir à désespoir, personne sera là pour répondre, personne sera là pour assumer, personne sera là pour faire chier.
On y va !